LA REFORME FERROVIAIRE ! Priorité aux grands axes

LA REFORME FERROVIAIRE

Depuis la publication de la directive 91/440 du 29  juillet 1991 fixant le cadre de la libéralisation ferroviaire, l’Union Européenne n’a eu de cesse que la France lui emboite le pas !

Ce mercredi 14 mars 2018, le conseil des ministres a été précisément réunit pour répondre à cette demande de l’UE, et pour se faire, le gouvernement a opté pour le passage en force des ordonnances. L’objectif visé répond à trois points précis :

  1. le gouvernement cède à l’Union Européenne et veut aller vite.
  2. le gouvernement entend ainsi empêcher tout débat à l’Assemblée Nationale, bien qu’il ait la majorité absolue.
  3. le gouvernement tente de prendre de vitesse les syndicats.

Sur la forme la méthode mise en œuvre s’appelle un coup de force, et le rejet du droit d’expression.

Sur le fond, le gouvernement prend un risque considérable sur un projet dont la finalité induit la disparition du service public, fait le forcing pour imposer la libéralisation et la mise en concurrence, donne la priorité aux TGV et aux grandes lignes, concentre essentiellement les investissements vers les secteurs ou le volume de voyageurs le nécessite, engage un processus de cession des ateliers d’entretiens et de maintenance à des sociétés privées, engage la suppression massive d’emplois au sein de la SNCF.

Et pour les autres voyageurs de l’hexagone, il suggère la disparition des petites lignes, des TET, et de certains TER les moins remplis, la suppression des tarifs sociaux, suivie de hausses tarifaires répétitives pour parvenir à ce que le voyageur paie la totalité du prix d’un billet. Pour mémoire, c’est ce qu’a appliqué la région Grand Est en septembre 2017, en doublant les prix pour se positionner face à la concurrence annoncée.

C’est ce qui ressort du rapport Spinetta, que l’ADV/CLCV a synthétisé, après avoir consacré 3 semaines à éplucher page par page, ce rapport de 126 pages. Elle a parallèlement transmis son expertise, ce mercredi 14 mars 2018, à la confédération CLCV dont elle dépend.

En conclusion, l’ADV/CLCV est très critique ! Le gouvernement plie devant l’Union Européenne, et accepte explicitement la disparition du secteur public, pour le remplacer par la gestion privée ?

Pour mémoire, d’ici à 2 ans, les Etats devront se mettre en conformité avec la libéralisation voulue par l’UE. A partir de 2020, les TGV seront mis en concurrence, suivis en 2023 des transports régionaux. Néanmoins, les régions conservent  la faculté d’anticiper la mise concurrence, comme l’ont annoncé les régions PACA, Grand Est, etc.

1 Pour l’association qui a passé 12 ans en réunions de concertations aux Audits de Sécurité Ferroviaire à St-Lazare à Paris, et confirme l’efficience de cette direction. Sans rien occulter de ce dossier, sa première priorité va donc à la sécurité ferroviaire, de laquelle découle la suite ! En effet, à ce jour, les 27 Etats n’appliquent pas entre eux, les mêmes méthodes et pratiques en matière de sécurité ferroviaire. L’UE souligne à cet effet des écarts allant de 1 à 10.

 

2 Pour les voyageurs, ce rapport tente de nous faire avaler l’idée que seuls les TGV, les grands axes et les grandes villes à fort trafic de voyageurs, doivent bénéficier d’investissements pour améliorer leur pertinence.

 

3 Que par contre, 10.000 km de voies sont à rayer de la carte du réseau ! Ce qui veut dire que les populations résidants dans les zones excentrées et mal desservies sur l’ensemble du territoire, seraient contraintes à migrer vers les grands centres, pour disposer d’un service ferré, et par contre coup d’un emploi ! Voila la société que nous propose l’Etat et l’UE.

 

4 Ce rapport enfonce le clou, en indiquant que les services de transports ferrés ne devraient être accessibles qu’aux zones urbaines et périurbaines densifiées par les flux de voyageurs ! Qu’ailleurs, ces services n’ont pas lieu d’exister.

 

5 Que les tarifs des billets de trains devraient être élevés au coût réel ! Prenant l’exemple du transport régional sur l’hexagone, le coût d’exploitation des régions est de 3 milliards, et les recettes payées par les voyageurs sont d’1 milliard ! Soit un différentiel de prix du billet de train qui devrait, selon le rapport, être multiplié par 4 !

6 Que l’ensemble des tarifs sociaux sont un handicap au bon fonctionnement de la mise en concurrence visée. Et que dès lors, ces tarifs devraient être supprimés.

 

7 L’entretien des voies deviendrait sélectif, et fonction de l’importance des flux de voyageurs. Cet entretien serait effectué de nuit en IDF. Pour le reste du réseau, ces travaux continueront à être effectués de jour, en empoisonnant la libre circulation des voyageurs contraints à prendre la voiture, comme ça l’est dans le Pays-Haut lorrain jusqu’en juin 2018.

 

8 Que ce rapport occulte l’impact des nouveaux transports Macron, Uber, ou le covoiturage, qui grèvent la SNCF. A noter que les cars Macron ont à eux seuls, captés 6,1 millions de passagers pris à la SNCF ! Or, aucune étude sérieuse n’a été menée pour étudier les conséquences de leur faisabilité, face aux impacts touchant la SNCF.

 

9 Que les ateliers d’entretien et la maintenance seront cédés par lots aux régions, qui pourront ensuite les remettre aux entreprises privées. Un non sens, car c’est la base même de la sécurité ferroviaire ! Quant aux personnels, « ils auront le choix d’opter vers le nouvel opérateur, ou de le refuser », dans ce cas, il leur sera notifié une mesure de droit commun.

La mise en péril de la sécurité ferroviaire se jouera précisément là où cette compétence irremplaçable est condamnée à disparaître ! D’ores et déjà, des effectifs fondent partout, les guichetiers manquent, ceux en gare de Longuyon et Joeuf seraient supprimés ! Cela confirme que la SNCF a adopté le principe de l’ouverture à la concurrence et la met en œuvre.

 

10 Que l’arrivée de nouveaux entrants, dont l’objectif vise uniquement à sélectionner les sillons juteux, va peser dans le fonctionnement d’une infrastructure aussi vaste que celle de la SNCF, et que cette connaissance ne s’acquiert qu’avec une expertise et une connaissance confirmées. Pour l’ADV/CLCV, l’on ne devient pas une entreprise ferroviaire du simple fait de la mise en concurrence.

L’inquiétude de l’ADV/CLCV est donc manifeste, car ce qu’ignore le lecteur, c’est que le réseau français est déjà occupé par 29 opérateurs, dont 6 pour les services de voyageurs (la SNCF, l’ICE Allemagne, la Renfe Espagne, Thello Italie, Eurostar pour l’Angleterre et Thalys pour la Suisse, ces deux derniers étant gérés par un consortium européen).

Tenant compte de ce nombre, si l’on y ajoute encore de nouveaux entrants, la gestion actuelle étant déjà très complexe, ce projet réunit toutes les conditions pour rendre le réseau ferré ingouvernable et à risques.

 

11 Ce rapport mentionne la nécessité de réduire le nombre de gares TGV, en les passant de 200 à 60 ? Avec un tel raisonnement, un voyageur excentré, la plupart, serait amené à faire 50 à 100 km en voiture pour un joindre un. De même, ce rapport prévoit une réduction du nombre de TGV en les passant de classique (1 étage) à 2 niveaux. Ce nombre a déjà été réduit. Il est passé de 460 rames en 2012, 415 en 2017, et en prévision, 302 en 2027. Si confirmée, cette évolution annonce une difficulté aux TGV

 

12 Face aux ambitions négatives de ce rapport, dont le seul but est la rentabilité, et l’offre de services garantie aux seuls nantis des grands axes, l’association estime que l’aménagement du territoire a vécu, et que le développement dit durable ne cesse de se concentrer que sur les seules grandes villes et les grands axes !

Au lieu de se lancer vers des ordonnances sans débat, le gouvernement serait bien inspiré de s’interroger et de se préoccuper de sa politique d’aménagement du territoire, vu le nombre de zones de plus en plus délaissées, celles-ci poussent des populations à l’exode. Apparemment, l’adage « gérer, c’est prévoir » semble inconnu.

courriel : adv-clcv@orange.fr

blog : http://adv-transports.clcv.org